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9 janvier 2015 5 09 /01 /janvier /2015 11:14

 

 

Mon canard local titre ce matin « … la traque aux tueurs et aux amalgames », et sans lire la colonne de la une, je file sur le clavier pour poser ce que m’inspire le mouvement populaire suscité par le massacre gratuit de Charlie Hebdo.

 

Oui, c’est atterrant, mochissime, psycho-rigide, ce qui s’est passé. Et c’est un tel maelstrom dans les medias, qu’en écoutant certaines réactions à la radio, j’ai failli me planter dans le trottoir en pleine tournée de soins à dom’. Je fais gaffe de changer de chaîne ces jours-ci, lorsque les TJ brassent en boucle les dernières nouvelles, les commentaires éclairés m’irritent à un tel point parfois…

 

 

Mourir pour des idées, oui, mais de mort lente, hein. Tuer pour des idées, là, oui, c’est intégriste, inté-triste.

 

 

Et ce n’est pas moins énervant d’entendre seriner des haut-le-cœur formulés de telle manière qu’on se demande si l’intégrisme ne menace pas également les bien-pensants de l’autre côté de la barrière mentale. C’est dit comme si on avait forcément raison, quand la seule différence entre « nous » et « eux », c’est qu’on ne prend pas les armes.

 

Cabu, et surtout Wolinski, ont travaillé dans la dérision, en se réclamant d’être des ados de 70 ans. Quand il est clair que ce qui paraît de doux quolibets aux uns, tentant le désamorçage des bombes idéologistes, met au contraire les autres littéralement sur les dents, et que la liberté d’expression réclamée n’est tout simplement pas une valeur en vigueur pour ceux qui répondent à la kalachnikov, qu’espérer du fait de camper sur ses positions humoristes? La moquerie est quelque part l’arme de ceux qui se pensent plus puissants par la pensée et le mood d’un groupe qui se tient les coudes, et désigne le mouton noir. Celui qui est moqué peut faire bonne figure, mais ruminer une vengeance subtile ou éclatante, s’il se sent acculé.

 

Le mot d’obscurantisme a été utilisé pour fustiger l'attitude terroriste: « un obscurantiste prône et défend une attitude de négation du savoir. Il refuse de reconnaître pour vraies des choses démontrées. Il pose des restrictions dans la diffusion de connaissances. Il est contre la propagation de nouvelles théories. » (Wikipedia)

 

Voilà les choses posées ; et si l’on disait que « nous » prônons et défendons une attitude de négation du savoir relatif à la donne extrémiste ? Que nous refusons de reconnaître pour vraies les actions extrémistes, largement démontrées donc hautement potentielles ? Et si nous posions des restrictions dans la diffusion de la connaissance que nous avons de telles actions, et si nous étions contre la propagation de cette théorie extrémiste à un point dangereux... J’ai en rétine l’image des 3 singes : je ne veux pas voir, ni entendre, ni dire l’évidence – il n’est pas question de justice pour prévenir les exactions (selon la doctrine, ces trois Justes sont à présent au Paradis avec chacun leurs 72 vierges, alors tu penses bien qu'ils n'en avaient rien à cirer, de la justice) mais de justesse d’évaluation. Je n’ai pas de solution,  pas de prétention. Mais le discours ambiant me laisse perplexe…

 

 

Un truc qui me choque, c’est d’entendre parler comme si l’on avait forcément raison, point. Qui que ce soit, remarquez. Et de vouloir que l’autre s’aligne sur une tolérance de bien-pensiste qui se proclame à sens unique, en fait. Car si nous étions minoritaires de pensée et de valeurs dans une société - je veux dire par « nous « ceux qui prônent le dialogue et la cohabitation des croyances, qu’est-ce qui nous garantirait de ne pas recourir à la violence ? Toute révolution comporte une part de régression sur certains points : 1789 a été l’occasion de réduire les droits des femmes en Hexagonie, par exemple. Et le peuple alors est bien passé par le recours aux armes, non ? Guillotiner ceux qui ne pensent pas « droit », ça s’est fait. L’intégrisme de l’époque a voulu que même des révolutionnaires accomplis se fassent décapiter.

 

 

J’avais vu il y a quelque temps un fragment de documentaire dont le thème général m’échappe ; on y voyait l’épouse de Wolinski et Benoîte Groult tenter de raisonner Wolinski quant à ses provocations des féministes, et lui qui ne cessait de répondre que c’était du trente-sixième degré.

 

 

Benoîte Groult, c’est une de mes figures archétypales ; ses livres, en particulier « Ainsi soit-elle », c’est du bonheur à lire quand on est porteuse de seins et d’un appareil reproducteur, elle met le doigt avec précision sur la haine du con, sur l’attitude qui consiste à dénigrer bassement la gent féminine au moyen de remarques décisives consistant à clore un débat par le simple argument que l’interlocuteur n’est qu’une femme. Pan dans les dents.

 

Wolinski mettait le doigt, lui, sur les absurdités que tout un chacun peut être amené à proférer en dernier recours et à l’inégalité flagrante que Groult évoque dans ce fameux ouvrage. Chacun sa manière. Encore faut-il dépasser le discours premier, ce qui n’est pas évident quand le contexte et la pensée sont en exacerbation permanente.

 

 

 

Alors quoi ?

Ca me soûle d’entendre et les uns et les autres s’indigner sur une attitude dont ils ne sont pas garantis d’être exempts eux-mêmes.

 

 

Tu vois, lecteur, là je pitonne en salle d’accueil en attendant que mon Duplo de voiture soit révisé, il y a une téloche qui crache minute par minute les derniers relents de la chasse à l’homme en France… Hélicos, ambulances, policiers cagoulés, tout le tremblement. On dégommera les affreux, puis on leur portera secours, pour qu’ils arrivent le plus possible en vie à un procès qui ne les mènera pas à la peine de mort, mais qui aurait pu les mener à l’échafaud il y a 50 ans. Entre eux, il y a eu Badinter, c’est la seule différence.

 

 

Au-delà du besoin de manifester solidarité et désolation, les grands rassemblements à Paris et même à la place de la Riponne chez moi me paraissent drainer des désespoirs individuels, qui se raccrochent à la moindre chance d’échanger entre « gens de bien » – c’est-à-dire ceux qui pensent comme « nous ». Si je me joignais à la foule, je chercherais des musulmans, et j’en trouverais. Et j’espérerais aller plus loin que des condoléances, des actes de contrition de la communauté qui bien que croyant aux mêmes valeurs fondamentales que les flingueurs, ne se retrouverait pas dans de tels actes et condamnerait les extrémistes.

 

 

Tiens, j’ai aussi une dent contre ce chroniqueur qui n’a pas hésité à dire que tout comme il y a maintenant un « 11 septembre », il y aura désormais un « 7 janvier ». Obama est allé poser sa griffe à l’ambassade de France aux USA, sur le livre public destiné à recueillir les messages divers ; la belle affaire… sympathie ou diplomatie… tous les deux probablement, mon capitaine : finir son billet par « vive la France », quelle curieuse idée. D‘ailleurs la capacité de nos voisins à tirer la couverture à eux me laisse perplexe, c’est comme Lothar en 2000 ou encore en 1999, je ne sais plus : dans les TJ, les documentaires produits ensuite, on aurait dit que la tempête s’était arrêtée aux frontières, drame national plus qu’européen… S’cusez, mes copains français, on se cause entre potes… hein, Thierry, hein Bruno, hein, les autres ?

 

 

Moué. Voilà, on a nos martyrs du beau, du bien, du vrai, l’encre n’est pas près de s’arrêter de couler. L’embêtant, c’est que les affreux se réclament aussi du beau-bien-vrai. Le sang non plus ne va pas arrêter de couler, du coup!

.

 

 

Allez viens mon Zorro, installe-toi sur la couette, bien calé sur ma hanche. Lance-moi des regards lourds alors que je déguste mon vacherin au four sur patates en robe des champs, toi qui n’as que des croquettes de luxe auxquelles faire un sort.

 

 

Moi je me branche sur M6, Christina Cordula et ses serials shoppeuses ; besoin d’échapper au deuil et aux imprécations, le futile paraît d’un grand secours tout-à-coup. Respirer léger, rose et clinquant. Me cramponner à mon programme du week-end : être soulagée d’avoir fait réviser mon véhicule et d’avoir des balais d’essuie-glaces en ordre, aller voir Oriana et ses doigts de fée sur mon cuir chevelu traité aux huiles essentielles, et aller demain faire détendre mon dos chez Linda. Faire la méduse ensuite, quand les courses seront faites, le frigo plein, les menus pour le midi au travail dûment stockés dans l’excellent frigo qu’est en ce moment le coffre de la titine… anticiper le bien-être de mes vacances d’ici une semaine…

 

Et peut-être un peu de rangement et de ménage, pour autant que cela me paraisse une source de confort et de satisfaction.

 

 

Vous connaissez la définition d’ « égoïste » ? C’est « quelqu’un qui ne pense pas à moi ».

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